Choisir et accorder son instrument. Choisir une manière de produire des sons et en explorer la richesse.
- Les lattes du parquet. Chacune a un son particulier, jusqu’à grincer comme un sommier : craquements, arcs de fréquence, passage de relais d’une jambe à l’autre, réverbération des articulations du support fortement appuyé. Elles procurent aussi le plaisir de l’imprévisible et de la découverte toujours renouvelée.
- La canne. Il y a au moins deux possibilités de percussion : à la verticale bruit net et clair ; de biais bruit sourd et prolongé. On peut utiliser ces deux frappés pour produire des rythmes.
- La bouteille en acier avec comme baguette le stylo en polystyrène. Soit on le frotte le long des méridiens de la bouteille, soit on la frappe (l’endroit de la frappe a peu d’incidence sur la fréquence). Le son clair et joyeux renvoie aux percussions brésiliennes.
- Le cerceau hula hoop. Il produit une grande variété de sons : son toupie lorsqu’il s’approche du sol avec une forte précession ; son frappé lorsqu’on le lance horizontalement en « reviens » ou contre un mur, ou qu’on le jette d’une hauteur variable ; son frotté continu contre le parquet quand on le fait tourner autour d’un pied ou d’une main ; son frotté percussif lorsqu’en équilibre à la verticale on se l’envoie d’une main à l’autre ; son de flûte lorsqu’on le virevolte dans l’air. On peut laisser ces sons aller jusqu’à leur épuisement ou les reprendre au vol pour en produire un autre. Il reste une grande part d’aléatoire qui rajoute au plaisir du jeu.
Danser avec son instrument. Explorer la manière dont le corps tout entier peut participer au jeu de l’instrument et évoluer dans l’espace.
- Le jeu des lattes est déjà une danse : c’est par des déplacements qu’on les fait chanter.
- La canne et la bouteille se prêtent bien à la déambulation. Elles peuvent engager tout le corps, par exemple par le rythme en se déhanchant et en frappant du pied.
- Le cerceau requiert des mouvements amples et très variés qui créent leur propre chorégraphie. On écrit la partition avec tout son corps.
Duos. Former des duos où une personne joue et l’autre danse. Recommencer en changeant de rôle et de duo.
- Le rythme est une manière particulièrement puissante de se retrouver, de se connecter et de s’accorder. Il est contagieux et procure une grande intensité et joie.
- Le rythme active aussi une mémoire particulière des figures métriques : il nous transporte ainsi facilement dans une certaine culture musicale, un pays, une atmosphère, et peut nous embarquer dans une histoire.
- Le rythme produit facilement un jeu discret, saccadé. Il peut aussi être accueilli par un mouvement continu qui se déploie : cela permet de jouir de la tension entre la respiration de ce mouvement et la virtuosité du rythme.
- Qu’est-ce qui fait l’unité d’une improvisation musicale ? d’une improvisation dansée ? Le rythme peut cela : la répétition d’un motif est un lien du passé au présent et un pont jeté vers l’avenir. C’est l’option choisie pour le jeu de la canne et de la bouteille. Cette option existe aussi pour les lattes et le cerceau, mais elle est moins prégnante, d’abord à cause de leur temporalité et de leur latence (le temps du grincement, le temps du rebond) ; déjà leur grande taille invite à la lenteur.
- En dansant sur les sons du cerceau, on peut vivre une sorte de libération en cessant d’interpréter le jeu musical (ce qui est difficile tant il est erratique et foisonnant) pour ramener son attention sur son propre corps et le libre devenir de son mouvement.
- Les duos ont tendance à s’emballer : les partenaires s’enflamment l’un·e l’autre jusqu’à un engagement festif, l’amusement, la joie, la cocasserie, avec une ouverture vers la transe.
- On se redécouvre comme danseur dans chaque duo parce que chaque instrument engage un jeu différent. C’est une manière de se découvrir à chaque fois à neuf et d’éviter de retomber dans ses habitudes.